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Du nouveau sur les origines de l’islam
Quand la conquête est un outil pour le Salut de la Terre
Entretien avec Edouard-Marie Gallez réalisé par Guillaume de Tanoüarn et Romain Koller
Objections - n°2 - janv
ier 2006

Retour vers la partie précédente


Justement, existe-t-il des données permettant d’établir, au-delà des similitudes doctrinales entre le proto-islam et le judéo-nazaréisme, le sens de la collaboration de ces deux forces au moment de la prise de Jérusalem en 638? Quelle idée peut-on avoir des relations qui avaient existé entre Mahomet et ces judéonazaréens nourris de pensée eschatologique et apocalyptique?

Il est clair que les juifs qui entouraient Mahomet n’étaient pas des Juifs rabbanites. À ce sujet, il suffit d’entendre attentivement ce que les traditions islamiques ont à nous dire sur le personnage de Waraqa. J’en profite pour dire que son rôle a dû être si important qu’il n’a pas pu être effacé, alors que tant de témoignages islamiques anciens, écrits ou non, disparaissaient – en fait tous ceux qui sont antérieurs à la biographie normative de Ibn Hichâm, composée et imposée deux siècles après la mort de Mahomet : c’est seulement par des citations que l’on connaît quelque chose des écrits antérieurs, qui furent systématiquement détruits. Or, ce qui est dit de ce Waraqa est hautement révélateur, comme l’indique le dossier quasiment exhaustif réuni par Joseph Azzi sur ce personnage. On le présente comme un cousin de Hadidja, la première femme de Mahomet, ou parfois comme un cousin de celui-ci. Il pourrait être les deux, ce qui est même très vraisemblable. Il bénit leur mariage, et pour cause : il est dit « prêtre nasraniy », ce qu’il ne faut pas traduire par prêtre chrétien mais bien par prêtre nazaréen. Nous l’avons vu, les judéonazaréens comptaient des prêtres parmi eux, très probablement des descendants de la tribu de Lévi ; et il y avait des consacrés hommes – ceux que le Coran nomme “moines” et qui sont dits se lever la nuit pour réciter des psaumes (III, 113 ; IV, 163 ; V, 82 ; XVII, 55.78 ; LXX, 20) –, ce qui est à comprendre dans une perspective eschatologique et guerrière : le salut du monde vaut que l’on s’y consacre totalement. De Waraqa, le commentateur Al-Buhari (mort en 870) donne la présentation suivante : « Cet homme, qui était cousin de Hadidja du côté de son père avait embrassé le nazaréisme avant l’apparition de l’islam. Il savait écrire l’hébreu et avait copié en hébreu toute la partie de l’Évangile que Dieu avait voulu qu’il transcrivît ». Il est de la tribu arabe des Qoréchites, mais « il est devenu nazaréen ». Il constitue donc un pont entre les deux peuples. Al Buhari a encore cette parole à la fois énigmatique et révélatrice : « Lorsque Waraqa est décédé, la révélation s’est tarie ». À l’époque, il n’est pas question du tout de « révélation », sinon de traductions en arabe des écrits judéonazaréens (comme par exemple quand le texte coranique évoque les « feuilles d’Abraham » – celles de Moïse étant tout simplement la Torah c’est-à-dire les cinq premiers livres de la Bible). Les feuillets coraniques les plus anciens seraient-ils de lui ? Pas nécessairement, car les feuillets sont des écrits de circonstance – essentiellement de propagande –, alors qu’il est plutôt dit le traducteur de textes beaucoup plus important. Dans l’avenir, la recherche y verra sans doute plus clair sur ces points. En tout cas, il ne dut pas être le seul à écrire pour les Arabes « devenus nazaréens »… ou à convaincre de le devenir ! Christoph Luxenberg a montré le substrat araméen qu’il fallait quelquefois supposer pour lire correctement – c’est-à-dire en corrigeant parfois le diacritisme – certains versets coraniques particulièrement obscurs ; il n’y a là rien d’étonnant si l’on pense que la langue maternelle du ou des auteurs est le syro-araméen, la langue habituelle des judéonazaréens. Ce qui est dit également dans les traditions islamiques de Zayd, qui aurait appris l’hébreu et l’écriture dans les écoles juives, est également très révélateur, même si c’est approximatif : ce « juif » de Yathrib a joué un certain rôle dans l’élaboration du proto-islam, qui était encore le pendant arabe très peu autonome du judéonazaréisme. Il faudrait mentionner encore les inscriptions qu’on dit, faute de mieux, « judéoarabes » et que l’on a trouvées il y a quelques années dans le désert du Neguev (sud d’Israël) ; Alfred-Louis de Prémare les a finement analysées. Il s’agit d’invocations en arabe adressées par exemple au Dieu de Moïse et de Jésus, et elles datent de l’enfance de Mahomet. Par comparaison, rien de tel n’existe dans la région mecquoise, et d’autant moins que ni cette écriture ni cette langue arabe n’y étaient employées.


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