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Les ravages de la “morale correcte”
Joël Prieur
Objections - n°9 - février 2007

C'est Jean Sévillia naguère qui dans un gros livre bleu nous avait permis de baliser efficacement le champ de notre mémoire française, en décryptant les poncifs culturels de cette idéologie qu'il nommait l'historiquement correct. Avec Moralement correct, il récidive aujourd'hui ; il se fait le pourfendeur sans peur et sans reproche de toutes les fausses valeurs, qui par les temps qui courent, se font passer pour les vraies.

La correctness a une histoire. Elle est américaine. Tocqueville, au milieu du XIXe siècle, y voyait déjà un « moyen plus efficace que l'inquisition » pour formater des attitudes collectives ou imposer une vision du monde commune. Ce sont les impératifs catégoriques de la Branchitude correcte que décrypte pour nous, avec sa clarté habituelle l'auteur du Terrorisme intellectuel. Entre sexe attitude et Sans papiers mon amour, est désormais décrété moral par la Correctness ambiante, tout ce qui est permissif, jouissif, impulsif… Tout ce qui commence par « Moi, je… » Le désir de l'individu devient un droit. Sans jouer à la Statue du Commandeur, sans jamais arborer bêtement les oripeaux du Père la morale, Jean Sévillia, se tenant toujours au ras des faits, énumère l'un après l'autre les principes de cette morale nouvelle qui remplace l'ancienne. Safe sex, violence, assistanat social et stupéfiants en consommation libre, ce sont autant de facettes d'une immense déresponsabilisation collective. Sévillia s'en prend à notre individualisme forcené, qui nous fait tomber dans la banalisation de l'incivilité et nous retire jusqu'au goût du vivre ensemble. Du coup, la France n'est pas seulement une terre d'immigration, elle devient un pays d'émigration, chacun, dans la mesure de ses moyens, souhaitant quitter le navire avant qu'il ne soit trop tard ! Comment renverser cette situation ? Comment mettre fin à cette logique délétère, alors que se forment, à travers la banalisation de l'avortement ou la revendication de l'homoparentalité, de nouveaux tabous collectifs mortifères ? Aussi surprenant que cela puisse paraître, malgré le pessimisme de son diagnostic fondamental, Sévillia demeure optimiste. S'il est vrai que « la civilisation, cela s'apprend », sauvageons ou pas, l'humanité de l'homme a la vie dure. On ne le comprend jamais mieux que lorsqu'elle paraît menacée. « Même si elle n'est plus à la mode, même si les élites ne l'enseignent plus, la vraie morale n'a pas disparu. Elle anime encore le cœur et l'esprit de millions d'êtres. Si l'école a fait naufrage, des professeurs tiennent bon. Si l'éducation flageole, des parents n'abdiquent pas. Si la jeunesse dérive, des jeunes tiennent le cap. À tous ceux-là, il suffirait, les préservant du désespoir, de redonner confiance et de leur dire qu'ils ne sont pas seuls ».

Mais redonner confiance à ceux que les Vieux Romains appelaient la “sanior pars”, n'est-ce pas avant tout et depuis toujours l'œuvre des politiques ? Décidément, contre le Moralement correct, il ne suffit pas d'enseigner la bonne morale (cela ne servirait pas à grand-chose). Il faut répéter, en ce domaine comme en bien d'autres : Politique d'abord !

Joël Prieur


Jean Sevillia, Moralement correct, Recherche valeurs désespérément, éd. Perrin, 222 pp, 2007, 20 euros

 

 

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