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Daniel Hamiche répond à ses lecteurs
Objections - n°6 - juin 2006

Le 5 avril dernier, un participant au Forum Catholique (www.leforumcatholique.org), a reproduit la première partie de ma série sur « Le Judaïsme est-il un moyen de salut ? Contribution américaine au débat » (paru dans Objections n° 3, février 2006).
Le fil de discussion qui a suivi m’incite à deux précisions.

Un forumiste (EA) fait remarquer, non sans humour, que les États-Unis avaient en toutes choses dix ans d’avance, puisque mon article signalait le cinquantième anniversaire de la déclaration Nostra Ætate, alors qu’il s’agissait, bien sûr, du quarantième. C’est une erreur formelle qui est mienne et que je confesse…

Un second intervenant (Athanasios D.) est plus sévère puisqu’il conteste mon affirmation que « contrairement aux autres textes du Saint-Siège [Nostra Ætate] ne fait référence à aucun concile antérieur, à aucun Père de l’Église et à aucun Pape ».

Le forumiste croit devoir préciser que cette déclaration

  1. donne « 17 références aux Saintes Écritures », précision hors sujet puisque je ne dis nulle part qu’il n’y en a pas ;

  2. offre « une référence au Concile Vatican II lui-même », ce qui est encore hors sujet car j’évoquais un concile antérieur à la déclaration ;

  3. et signale « une [référence] au pape Grégoire VII ». C’est vrai, mais ce dernier point mérite quelques développements.

La note 5 de la déclaration signale, en effet, une lettre (n° XXI) du saint pape Grégoire VII, datée de 1076 – mais sans en citer le moindre extrait –, et adressée « ad Anazir (Al-Nâsir) regem Mauritaniæ ». Il est à noter que le nom du destinataire n’est point assuré puisqu’il est transcrit sous deux formes différentes. Sans trop entrer dans le détail de cette lettre dont je n’ai, par ailleurs, pu me procurer qu’un extrait en traduction anglaise (elle figure dans la Patrologie latine de Migne, mais je n’ai pas eu le temps d’y aller voir…), disons que saint Grégoire VII y reconnaît que chrétiens et musulmans « croient Dieu Un et le confessent, encore que de manières différentes », ce qui semblerait attester que chrétiens et musulmans adorent le même Dieu et justifier le n.3 de la déclaration : « L’Église regarde […] avec estime les musulmans, qui adorent le Dieu Un, vivant et subsistant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de la terre ».

Le problème – car il y a un gros problème – c’est qu’en 1076 aucun roi de « Mauritanie » (géographiquement de nos jours Mauritanie proprement dite et Maroc) n’a pour nom Anazir, ou Al-Nâsir, ou encore Anzir ou Nacir (selon la transcription de la version anglaise de la déclaration), voire Nasir ou Naseer. Ce personnage n’a laissé aucune trace dans l’Histoire. En 1076, celui qui gouverne la « Mauritanie » est Yusuf Ibn Tashfin (circa 1059-1106), premier roi de la dynastie des Almoravides. Possédait-il le surnom d’Anazir ou d’Al-Nâzir ? On l’ignore, mais ce qui est très improbable, selon les historiens, c’est que Yusuf Ibn Tashfin ait pu traiter avec saint Grégoire VII…

Il y a là une énigme historique doublée d’un problème sérieux si la seule citation connue d’un Pape suggérant que chrétiens et musulmans adorent le même Dieu, provient d’une lettre dont le destinataire est inconnu de l’Histoire, à supposer même  qu’il ait jamais existé…

 

 

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